« Gracie... Gracie! » La jolie blonde grogna, avant de se retourner et de plonger la tête sous ses draps.
« Bordel de Dieu! Tu vas te lever oui! On doit avoir une petite discussion... »
C'était la phrase que Gracie détestait le plus au monde! Quand quelqu'un vous disait "on doit parler" vous pouviez être sûre que, soit quelqu'un était mort dans votre entourage, soit vous aviez fait une grosse connerie qui le mettait en rogne! Hors, personne n'était mort dans l'entourage de Gracie... Soupirant pour la énième fois, elle dut se faire violence pour réussir à ouvrir ses yeux et pour ensuite, trouver le courage et la force de sortir de son lit. 10h06. Quelle horreur! Comment pouvait-on venir la réveillée aussi tôt?! Au bout de dix minutes, Gracie daigna sortir de sa chambre, alla enfiler un peignoir et descendit jusqu'à sa cuisine. Teresa, sa meilleure amie depuis l'époque où elles portaient encore des couches cullotes, l'attendait de pied ferme. Lui jetant un regard noir, Gracie passa sans même lui dire bonjours, ce qui fit sourire la seconde blonde de la pièce. Enfant, tout le monde pensait qu'elles étaient soeurs. Jumelle de surcroit, tellement la ressemblance entre les deux était frappantes... Bien qu'elles ne soient pas soeur, toutes deux étant fille unique, elles avaient quand même comme lien de sang d'être cousines.
« J'espère que tu as une bonne raison de venir me réveiller aussi tôt! - C'est vrai. J'avais oublié que les strip-teaseuses travaillaient le soir... » lorgnant du côté de sa cousine, Gracie vit que celle-ci était de très mauvaise humeur. Soupirant pour la centième fois depuis qu'elle avait les pieds hors de son lit, Gracie sorti une tasse pour se verser son café, avant de s'asseoir face à la jeune femme.
« Je sais que tu n'aimes pas cette activité, mais dis-toi que c'est pour faire un papier qui changera toute ma carrière! Ne crois pas que je vais rouler des fesses et me tortiller sur une barre toute ma vie. C'est justement pour avancée comme journaliste que je fais ça! - Ta notoriété, tu l'as eu avec ton papier sur les suceurs de sang! Tu n'en es pas devenue une pour autant. »
Un point pour elle! Gracie avait fait un papier qui lui avait rapporté gros, deux ans plus tôt, alors que les vampires avaient fait leur coming-out! Après l'apparition de celui-ci, elle avait eu une proposition de New York, qu'elle avait gentiment déclinée. Mais, cette expérience lui avait aussi permis d'écrire un roman, qui s'était assez bien vendu en Amérique. Elle avait aussi appris à connaitre certains vampires. Ils étaient peut-être morts aux yeux de la loi, ils n'en restaient pas moins des êtres avec un coeur et une conscience. Bien qu'elle soi une pure catholique, Gracie ait revu son jugement sur tout ce qu'ils disaient... Car, elle devait l'admettre, elle aimait assez bien les vampires!
« Bon la rabat-joie, on va à l'église? - Wow, ma très chère cousine qui reprend ses activités de bonnes croyantes? Quand arrêteras-tu de flirter avec les vampires et de te foutre à poil devant des dizaines d'hommes tous les soirs? »
Extrêmement ressemblantes physiquement... mais opposées l'une à l'autre niveau caractère!

Quelques heures plus tard, toute fraiche et souriante, Gracie Emmingway arriva au journal dans lequel elle travaillait depuis ses dix-huit ans. Elle avait commencé comme assistante, avant de prendre de plus en plus d'indépendance. D'ailleurs, elle avait eu un contrat digne de ce nom deux ans plus tôt, une fois qu'elle avait fait son article sur les vampires qui résidaient à Port Hudson et après avoir dénoncé des contre-indications dans la Bible, qui n'allait pas dans le sens de la réalité. Bien qu'elle ait encore à la messe de temps en temps, beaucoup moins qu'avant en tout cas!, elle restait la bête noire du prêtre.
« Alors Emmingway? Il est pour quand ton papier sur les nanas de la boîte de striptease? » l'un des collègues de la jeune et aussi, ancien amant de la belle. Il voyait d'un mauvais oeil le second "boulot" que son ancienne petite amie faisait. Extrêmement jaloux, il vivait assez mal le fait qu'elle se tortille et bouge le haut devant d'autres hommes... Ce qui ne touchait pas le moins du monde Gracie! « T'inquiète, c'est pour bientôt! »
En entrant dans le bureau de son boss, elle fut accueillie avec un grand sourire, avant que celui-ci ne lui mette un papier sous le nez. « Regarde ça, Gracie. La chance de ta vie! » encore une autre proposition de New York... Levant les yeux vers son supérieur, Gracie ne put s'empêcher de grimacer, avant que celui-ci ne l'interrompe.
« Non princesse, ne refuse pas encore! Je te connais depuis que tu es haute comme trois pommes. Je t'ai vu grandir, devenir une femme forte et indépendante, survivre à la perte d'être cher... Tu es toujours là, debout, plus belle et sure de toi que jamais, avec une envie incroyable et une ténacité que je n'avais encore jamais vue chez d'autres journalistes. Tu es la meilleure, même si tu n'as jamais fait d'études supérieures, tu restes meilleure que tous ceux qui t'entourent ici. New York, tu le mérites bien! Ne dis pas non... »
Ce qu'il ne pouvait pas comprendre, c'était que toute la vie de Gracie, passé, présent et futur se trouvait ici! Son père, son fiancé et son bébé étaient enterrés dans cette ville. Sa mère avait besoin d'elle, de sa présence et de sa force. Elle avait tous ses repères, toute sa vie et elle était heureuse à Port Hudson, malgré tous les drames qui s'y étaient déroulés... Dans un souffle, elle planta son regard dans celui de son supérieur et prononça, d'un ton qui ne laisserait place à aucun commentaire; « Non! Vous m'excuserez, mais je dois aller au club. Je n'ai plus que quelques semaines, avant de rendre l'avant-dernier papier. »